Neutralité carbone : de quoi parle-t-on ?
Neutralité carbone : définition
Lorsque l’on parle de neutralité carbone, on place souvent cette expression en lien avec un pays ou une entreprise. En effet, on parle par exemple de l’objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050 au sein de l’Union Européenne.
Cette neutralité carbone, précisément, désigne une situation d’équilibre entre les émissions de dioxyde de carbone générées sur cette planète et leur absorption par les puits de carbone. Il ne s’agit donc pas d’atteindre l’objectif ambitieux de ne plus émettre de carbone, mais simplement de ne pas en émettre trop par rapport à notre capacité à les assimiler.
À ce jour, aucun puits de carbone artificiel ne peut éliminer le carbone de l'atmosphère à une échelle suffisante pour lutter contre le réchauffement de la planète.
Aujourd’hui, l’enjeu de neutralité carbone à l’horizon 2050 est plus que jamais d’actualité afin de limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré par rapport aux niveaux d’émissions préindustriels. Pour maintenir cet objectif qui a été défini lors de l’Accord de Paris avec la signature de 195 pays, il convient de réduire les émissions de CO2 de 45% d’ici 2030.
Le défi est donc très important. Pour réduire drastiquement les émissions avec ce premier palier à atteindre en 2030, plusieurs transitions doivent être menées ensemble :
- Réduire la production et la combustion des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz naturel) ;
- Le soutien et le développement des puits de carbone naturels avec la reforestation ou une meilleure utilisation des terres ;
- L’adoption de nouvelles technologies comme les énergies renouvelables
- La modification des modes de vie actuels pour tendre vers plus de sobriété.
En Europe, différents textes réglementaires accompagnent l’objectif de neutralité carbone : le Pacte vert pour l’Europe ou encore la Loi européenne sur le climat qui ancre la neutralité carbone dans la législation contraignante.
La neutralité carbone en industrie avec la Stratégie Nationale Bas Carbone
En matière de neutralité carbone, l’industrie française a des efforts à déployer pour tendre vers ce résultat. En effet, en France, à ce jour, l’industrie représente environ 20% des émissions de gaz à effet de serre. Ces émissions sont surtout générées par les activités de la chimie, de la métallurgie, des matériaux de construction et de l’agroalimentaire. Ce sont les activités les plus émettrices.
Certes, les progrès vont dans le bon sens et des réductions de CO2 sont déjà à l’œuvre depuis quelques années, mais l’objectif de neutralité carbone en 2050 est un objectif ambitieux.
La Stratégie Nationale Bas-Carbone du gouvernement français dessine donc une feuille de route avec les orientations à prendre dans tous les secteurs d’activité pour lutter contre le changement climatique.
Pour l’industrie, il s’agit avant tout d’accompagner les entreprises dans leur transition vers des systèmes de production bas-carbone avec le déploiement de nouvelles filières. Il est également question de développer de nouvelles technologies pour supprimer les émissions de CO2 résiduelles. Enfin, la SNBC encourage les industries à opter pour les énergies renouvelables et l’économie circulaire.
Pour ce faire, le secteur industriel a donc tout intérêt à décarboner ses procédés et ses outils qui fonctionnent encore aujourd’hui à l’énergie fossile. Trois solutions s’imposent : l’électrification, l’utilisation de la biomasse ou de l’hydrogène.
De plus, il faut renforcer l’efficacité énergétique des installations en place, notamment grâce au déploiement de matériaux à faibles émissions. Enfin, les entreprises et industries peuvent s’appuyer sur le développement et les technologies de capture, de transport et de stockage du carbone.
Stratégies pour atteindre la neutralité carbone en industrie en 2050
Réduction des émissions de gaz à effet de serre et énergie bas carbone
Le premier levier sur lequel les industriels peuvent jouer est celui de l’efficacité des procédés industriels et l’efficacité énergétique. Cela signifie par exemple qu’en plus de choisir des équipements industriels qui permettent de produire plus et de meilleure qualité, ces équipements devront surtout consommer moins. Il n’est pas rare aujourd’hui de trouver des chaînes de production qui embarquent avec elles des systèmes de monitoring et de suivi de l’activité pour analyser en temps réel les consommations et ainsi adapter le rythme de travail.
De plus, l’électrification des procédés est une solution parfaite pour consommer moins d’énergie. L’énergie, lorsqu’elle est décarbonée, provenant de ressources naturelles renouvelables, pourrait remplacer les énergies fossiles pour faire fonctionner les moteurs. Aujourd’hui, seules 18% des ressources en électricité sont utilisées pour alimenter les fours. Il est donc possible d’augmenter cette part, tout en optant pour l’énergie nucléaire qui, bien que non renouvelable, permet de réduire l’impact de l’industrie à court terme. On peut aussi imaginer l’intégration de la biomasse avec la valorisation des déchets pour substituer le pétrole ou le gaz naturel dans des secteurs clés et très émetteurs comme les secteurs du ciment et du béton.
Il faut aussi adopter des nouvelles technologies de rupture pour les secteurs les plus émetteurs. Le secteur de la construction, très polluant, se doit de se réinventer autour de nouveaux matériaux de construction moins polluants. Il existe des possibilités : réduire les temps de cuisson du béton ou modifier sa composition. Ainsi, on peut verdir des matériaux pour de futures constructions bas-carbone.
La filière hydrogène est aussi une solution régulièrement évoquée pour transformer durablement l’industrie. Avec le développement de l’hydrogène produit par électrolyse de l’eau issu d’énergie renouvelable, on pourrait créer un hydrogène neutre en carbone. Or, l’hydrogène pourrait participer à la mutation de différents secteurs : celui des engrais ou encore de la sidérurgie.
Compensation carbone
Toutes les émissions incompressibles qui ne pourront pas être diminuées dans l’industrie peuvent être compensées via la compensation carbone.
Concrètement, la compensation carbone d’une entreprise consiste à financer des projets de réduction, de capture ou de séquestration de CO2. L’objectif de la démarche est d’équilibrer les émissions qui sont créées par les activités industrielles avec les capacités de stockage des puits de carbone existants sur la planète.
Le financement de projets de compensation carbone permet de développer ou d’augmenter les capacités des puits de carbone existants tels que les forêts, les océans et les sols.
Cette solution s’est inscrite comme une possibilité pour les grandes entreprises les plus polluantes à partir de la signature du Protocole de Kyoto en 1997.
Le marché de conformité de compensation carbone oblige les États et les entreprises les plus polluantes à compenser leurs émissions si elles n’ont pas réussi à atteindre les objectifs de réduction de carbone. Chaque année, les entreprises disposent d’un quota carbone en fonction du volume de leurs GES et de leur secteur d’activité. Un crédit carbone est égal à une tonne équivalente de CO2 séquestrée.
Innovation et transition énergétique
En matière de réduction des émissions de CO2, l’innovation technologique est vivement encouragée car la réduction seule des émissions n’est pas toujours possible ou suffisante.
On le sait, les énergies renouvelables sont une solution sérieuse pour réduire la dépendance de nos économies aux ressources fossiles polluantes. C’est pourquoi il est urgent de diversifier le bouquet énergétique de nos industries.
L’avantage, c’est que les énergies renouvelables évoluent également rapidement. Des innovations permettent d’équiper les industries des solutions les plus efficaces. Par exemple, les panneaux solaires à haut rendement qui utilisent des cellules photovoltaïques avancées convertissent plus efficacement la lumière solaire en électricité. De même, les éoliennes offshore placées dans les courants marins permettent de décupler la capacité de production des énergies éoliennes.
De plus, pour les secteurs industriels les plus polluants, la technologie de captage et de stockage du carbone (CSC) offre le moyen de capter directement les émissions de CO2 à la source. C’est une technologie prometteuse. Elle peut fonctionner de deux façons : avec la technologie solvant-amine, dans ce cas on utilise des solutions chimiques pour absorber le CO2 émanant des cheminées des industries. Il existe aussi la technologie CSC oxycombustion où l’on brûle les combustibles dans de l’oxygène pour capturer le CO2 du gaz.
De plus, la technologie de captage direct de l’air (DAC) est une autre solution expérimentale dans laquelle on va pouvoir absorber directement le CO2 dans l’air ambiant pour le stocker et le transformer.
In fine, le CO2 stocké avec ces deux technologies peut aussi être capturé et stocké dans des réservoirs en sous-sol. Seulement, il faut respecter de nombreuses contraintes techniques et géologiques pour créer des réservoirs de stockage sur un territoire. En France, par exemple, seules trois zones spécifiques sont pressenties pour accueillir le CO2 collecté sur les plus grands sites industriels.
Les défis de l'atteinte de la neutralité carbone en France
Émissions industrielles et impact environnemental
Pourquoi est-il si important que l’industrie se transforme et atteigne la neutralité carbone ? Pour répondre à cette question, il suffit de s’intéresser à l’impact environnemental des émissions de CO2 sur la planète.
Les émissions de CO2 sont responsables du changement climatique. Le CO2 et les autres gaz à effet de serre émis emprisonnent la chaleur dans l’atmosphère. Cela entraîne un grand nombre de réactions en cascade : augmentation des températures, fonte des glaciers, acidification des océans.
De plus, la qualité de l’air est fortement diminuée par rapport à l’ère préindustrielle. En effet, les émissions industrielles sont chargées de polluants nocifs comme les particules fines, les oxydes d’azote ou les composés organiques volatils qui impactent la qualité de l’air et qui ont des effets sur la santé humaine sur le long terme.
La qualité de l’eau et des sols est aussi fortement dégradée par l’activité industrielle. Par exemple, les émissions industrielles peuvent contaminer les cours d’eau et les nappes phréatiques avec les eaux de ruissellement. On peut aussi noter une pollution des sols lorsque les rejets industriels ne sont pas correctement gérés.
Enfin, l’activité industrielle a un impact sur la perte de biodiversité et des écosystèmes naturels. Pour obtenir des matières premières, la forêt est l’habitat le plus détruit. Cela contribue à la perte des habitats pour la faune locale. On peut aussi noter que certains polluants industriels peuvent avoir des effets toxiques sur la faune et la flore.
Pour éviter ces pollutions, il est essentiel de réduire les émissions de CO2 dans l’industrie, notamment au niveau des 3 sources d’émissions principales :
- La combustion des énergies fossiles dans les industries lourdes (sidérurgie, cimenterie, raffinerie) ;
- Dans la production de matériaux tels que le ciment, l’acier, le plastique ;
- Dans le transport de marchandises, des matières premières et des produits finis.
Contraintes techniques et financières
La réduction des émissions de carbone dans l’industrie n’est pas sans défis à relever. Les premiers sont de l’ordre technique.
Bien qu’il existe aujourd’hui des solutions prometteuses comme les technologies de capture et de stockage du CO2, ces technologies ne sont pas toujours optimales en termes de coût ou d’efficacité. Il reste aussi des freins économiques majeurs à relever.
De plus, lorsque l’on transite vers un modèle énergétique différent, par exemple lorsque l’on opte pour les énergies renouvelables, il faut prévoir la refonte des infrastructures. Une mise à niveau du réseau électrique peut être nécessaire, ou encore la création de points de recharge pour les véhicules électriques. Ce sont des investissements et une réorganisation des lieux à prendre en compte.
Les énergies renouvelables font également face à une contrainte majeure qui est celle du stockage de l’énergie. Lorsque l’énergie est produite en grande quantité, par exemple en été pour le cas du photovoltaïque, il faut pouvoir stocker cette énergie excédentaire. Les batteries ont aujourd’hui des capacités de stockage limitées. De nouveaux moyens de stockage doivent être développés.
Enfin, les contraintes financières restent nombreuses. Les coûts de ces nouvelles installations sont importants. On peut alors s’interroger sur le retour sur investissement de ces technologies. Il se fait sur des dizaines d’années. C’est pourquoi des subventions ou des incitations gouvernementales doivent exister pour accompagner les industriels à changer leurs modes de production au regard de la transition énergétique.
Réglementations et pressions externes : Quel est l'objectif pour 2050 ?
Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, les industriels et les entreprises sont soumis à différentes réglementations et normes qui les incitent à se transformer.
On peut par exemple citer la norme ISO 14000 qui encadre le management environnemental et qui donne un cadre aux entreprises pour réduire leur impact carbone. Les normes ISO 1406X et 1404X s’intéressent à l’économie neutre en carbone et à l’analyse de cycle de vie des produits. La norme ISO 26000 encourage la responsabilité sociale des entreprises, tandis que ISO 50001 s’intéresse à la gestion de l’énergie dans l’entreprise.
De plus, la loi Climat et Résilience imposent différentes transformations aux entreprises, notamment celle d’installer des panneaux solaires ou de végétaliser leurs bâtiments.
Enfin, le bilan GES réglementaire oblige les entreprises à connaître leurs émissions de CO2 dans le but de les réduire.
Indéniablement, ces réglementations contraignent les entreprises dans un cadre réglementaire, mais sont aussi attendues par les consommateurs eux-mêmes. Les consommateurs sont de plus en plus à la recherche de produits éco responsable ou intéressés par les entreprises qui font preuve de transparence sur leur mode de production.
Les pressions externes des consommateurs, tout comme les réglementations, sont des moteurs essentiels pour encourager les pratiques industrielles plus vertueuses. Les entreprises qui sauront effectuer leur transition rapidement seront celles qui pourront se démarquer et se maintenir dans les prochaines années.
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Neutralité carbone : à retenir
C'est quoi exactement la neutralité climatique ?
La neutralité climatique fait référence à un équilibre entre la quantité de CO2 émise dans l'atmosphère et la capacité de la Terre à absorber ce gaz. Elle vise à stabiliser l'évolution du climat en limitant l'augmentation de la température mondiale. Il s'agit de réduire les émissions de CO2 pour éviter les impacts négatifs sur le climat et maintenir un environnement durable pour les générations futures.
Quand devons-nous atteindre la neutralité carbone planétaire ?
L'atteinte de la neutralité carbone planétaire se fait lorsque l'empreinte carbone des activités humaines est équilibrée par les mécanismes de séquestration du carbone dans les puits de carbone. Cela signifie que les émissions de CO2 que nous produisons sont compensées par les absorptions naturelles ou artificielles de carbone. L'objectif est de parvenir à cet équilibre le plus tôt possible pour limiter les impacts du changement climatique. Cependant, l'horizon 2050 est souvent énoncé car certains décrets et accords intergouvernementaux en font une date butoir.
Quelle est la différence entre neutralité carbone et net 0 ?
La neutralité carbone signifie que les émissions de CO2 sont équilibrées en atteignant un équilibre entre les émissions et les retraits de carbone. Lorsque l'on parle de "net zéro" ou "net 0", en revanche, on cherche à réduire les émissions à un niveau très bas et à compenser le reste par des méthodes de séquestration du carbone, sans nécessairement atteindre un équilibre parfait. Ainsi, la neutralité carbone implique un équilibre tandis que "net zéro" se concentre sur la réduction maximale des émissions avec compensation.